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A la découverte du Discovery des Daft Punk


Discovery - Voyager
One More Time Aerodynamic Digital Love Harder, Better, Faster, Stronger Crescendolls
Night Vision Super-Heroes High Life Something About Us Voyager
Veridis Quo Short Circuit Face to Face Too Long

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One more time

Le générique de début de ce road-movie en fusée démarre dans l'arrière-salle du premier album Homework et sert de sas de décompression entre le passé de Daft Punk et le futur ahurissant qui nous attend ici. Accessoirement, la partie a capella de cet hymne XL – qui inventait la "stadium house" – reste l'une des choses les plus étonnamment plaintives et touchantes entendues en l'an 2000.



Aerodynamic

Dès ce second single, dont la charte visuelle a été logiquement confiée au Japonais Matsumoto (Albator), Daft Punk brasse d'autres souvenirs de télévision enfantine : il y a des réminiscences d'après-midi canapé à mater les clips de Platine 45 dans cette fulgurance, des cloches d'AC/DC aux slaps immortalisés par Nile Rodgers. Avec sa basse funkadelicienne, son étrange boucle psychédélique, ses riffs savamment torturés et sa guitare en métal inconnu sur terre (le Tryphonium du Professeur Tournesol ?), on pense à un tour de cochon joué par ces ludiques robots : faire bouffer des champignons magiques à Rondo Veneziano.



Digital Love

Largement au-delà du bien et du mal, les influences remontent ici très loin – parfois même à nos cauchemars d'enfance. On y entend donc le clavier à peine déguisé de Supertramp, l'élan grandiloquent des Wings mais aussi la naïveté toujours aussi touchante des copains de Phœnix. On y entend surtout un hommage franc du collier de Thomas Bangalter à sa chanson préférée de tous les temps : Video killed the radio stars des Buggles.



Harder, Better, Faster, Stronger

Toute l'euphorie communicative de Daft Punk tel qu'on le connaissait vient, pour la première fois, rendre visite sans déguisement à Discovery. La voix est caressée au vocoder, sur un groove aussi carton que cartoon, qui fait de ce petit hymne à la joie le digne successeur de Around the world. On a failli écrire Around the word up, tant cette chanson malicieuse évoque le groove canaille et outrageusement sexy du Word up de Cameo.



Crescendolls

Même George Clinton se serait tenu à l’écart d'une boucle aussi cintrée, aussi casse-gueule et désordonnée. Mais pas Daft Punk : il y a là une telle générosité dans l’enthousiasme que le morceau tient étonnamment droit, la monstrueuse maîtrise de la chose rythmique permettant au duo toutes les digressions sur les breaks et les mélodies. Bref, quand la route est si droite, si parfaitement goudronnée, on peut se permettre tous les zig-zags.



Night Vision

Si l'intro évoque franchement le slow mouille-slip le plus épuisant de nos années boums (le I’m not in love de Ten CC), la fin de cet interlude nous rapproche plutôt de Berlin, à l'époque où Eno et Bowie écrivaient ensemble la BO des mondes à venir. Nightvision, comme réponse à Sound & vision.


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Super-Heroes

Avec son groove illuminé, halluciné, Superheroes évoque la secte Krishna le jour de distribution des ecstas. Là aussi, aucun complexe à mettre la joie en avant, toute entière contenue dans un pied de grosse caisse auquel rien ne peut résister. Là encore, étalage de claviers seventies, remisés depuis ELO. Fin épique, belle et romantique comme les dernières secondes d’un épisode d'Albator.



High Life

High life, comme une réponse radieuse au Good life d’Inner City. Mais à la house charnelle et souple des Américains, Daft Punk offre ici une house maltraitée, distordue. La mélancolie, pourtant, comme partout ailleurs sur cet album, guette la fête. Ici, elle profite des incroyables chutes de tension et du jeu de yoyo des dynamiques pour s'infiltrer. Là encore, le pied de grosse caisse remet tout le monde debout : la danse est alors obligatoire, éventuellement à l'horizontal.



Something About Us

On espère une confession, un morceau où le duo se met à poil, vide son sac, ose le folk-confession : douce ironie, une fois encore, sur les mots. Car c'est à un funky mondain – sans doute le morceau le plus faible du disque – que le duo a réservé ce titre intrigant. Mais au moment où on commence à se dire que Shalamar ou même Robert Palmer (Every kind of people) auraient pu, dans les eighties, s'offrir ce petit groove anodin, on se rappelle que le morceau est basé sur une boucle vraiment anormale, impossible. Seule Björk réussit à faire de la musique populaire avec des éléments aussi cagneux et amochés.



Voyager

Avec son adorable petite guitare funky toute étriquée, le morceau parait surtout dominé par un beat autoritaire, totalitaire. Erreur : il est totalement asphyxié par une basse vicieuse, qui s'entortille autour du beat pour mieux l'infléchir, le soudoyer. Le morceau paraissait martial : il est finalement jovial. Curieux, mais parfait pour l'auto-radio. Celui de la station Mir, s'entend.



Veridis Quo

Lire Very Disco, comme il faut lire Disco-very sur le titre de l'album, sacrés farceurs. Sauf que là, les robots Daft Punk grillent les fusibles, fondent les circuits. Veridis quo, donc, commence sur un orgue d’église, façon générique pour les grandes soldes à la grotte de Lourdes réécrit par Ennio Morricone, jusqu’à ce qu’un beat sans merci vienne s'emparer brutalement de tout l’espace. On pense alors bien sûr énormément à Giorgio Moroder, à Albinoni impitoyablement torturé par Trevor Horn. On pense à l'effroi que cette bombe à retardement pourrait provoquer sur le dancefloor. On pense que le dancefloor est le grand oublié de cet album (les remixes se chargeront d'y remédier) et on ne s'en plaint pas. Ou comment la musique classique entre chez Daft Punk, par le sas des missiles.



Short Circuit

On le sentait sur le morceau précédent : dans les puces des robots, il y a eu short-circuit, court-circuit entre la mémoire et le présent. Si le morceau évoque sans ambages le Rock it d’Herbie Hancock, jamais – comme partout ailleurs dans ce disque – Short circuit ne vire à l'exercice de style. Il s'agit surtout ici d'un pur exercice de plaisir autour de l’electro early eighties, sur lequel on rêve d’entendre Futura 2000 grimper au micro. Totalement tombé du ciel au beau milieu de la fiesta, un pont invraisemblable apporte mélancolie et consternation sur le dancefloor. Après une telle douche froide, le morceau ne se finit pas : il fond. Miam.



Face to Face

Là, Daft Punk joue avec nos nerfs, accumulant les faux départs, les fausses pistes, les sons parasites : le morceau a l’air droit, solide mais il est totalement vermoulu, détraqué par les délires soniques du duo. Sans doute le genre de funky de traviole dont rêvait Eno à l’époque du Remain in light des Talking Heads. Livrée sans filtre, sans fard, la voix de Todd Edwards est d'une franchise étonnante pour ces incorrigibles manipulateurs.



Too Long

Romanthony chante, lui aussi, avec clarté et naturel, cette manière de gospel la trouille au cul. Puis Daft Punk entre en scène, sur un tapis volant de claviers fluctuants, vite rejoints par ce pied de batterie dément, têtu, impitoyable. Une cymbale pas possible se charge à mi-parcours de rallier défini tivement les suffrages du dancefloor, de combler de jubilation la house nation – ce morceau semblant être le seul à lui être clairement destiné. Ce qui fascine ici, c'est le petit fouillis rythmique en fond sonore puis le final en grande furie bacchanale, la partie sans fin, avec des rebondissements à qui mieux-mieux, la fiesta hallucinée, le groove possédé, la french touch devenue transe touch. La voix de Romanthony se fait bouffer par les machines, le beat reprend le pouvoir : le disque avait commencé sur le dancefloor, il y finit, mais épuisé par un voyage franchement pas raisonnable dans les tréfonds de la musique, là où plus personne n’ose envoyer de douaniers, à la frontière lointaine du bon et du mauvais goût. Et jamais Daft Punk ne se fait serrer par la milice. Car quand on croit la machine (navette Discovery) à plein régime, les pistons à rouge, les deux robots appuient sur le bouton que personne n'a encore découvert, qui permet à l'ensemble de passer à une vitesse supérieure, pas du tout prudente. C'est là tout le mystère Daft Punk, cette capacité à laisser tout le monde sur place, terrassé, humilié par cette dynamique. Exactement ce que Spinal Tap cherchait à découvrir en inventant, sur ses amplis de guitares, des potentiomètres qui montaient jusqu'à onze. Discovery se joue au moins à douze.
Jean-Daniel Beauvallet
Inrocks



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